Tous différents, une chance pour tous

Soirée « Les Intelligences Multiples »

 

Jeudi 27 juin 2019 à l’Aquatis Hôtel Restaurant de Lausanne

 

« Tous différents, une chance pour tous. Quand cultiver l’altérité est une richesse pour notre société »

 

Une soirée teintée d’Humilité, d’Humour et d’Humanité grâce à 4 conférenciers exceptionnels, une table ronde enrichissante, le tout ponctué de saynètes improvisées, et clôturée par un chaleureux cocktail dînatoire.

 


« Les autistes chiants dans des clubs de gens che-lou, ça existe ! »

 

Josef Schovanec, philosophe avec autisme (type Asperger), est l’auteur de plusieurs livres et un voyageur polyglotte, ambassadeur de l’Autistan et militant pour la dignité des personnes avec autisme.

 

Josef « votre serviteur » s’élance en chaussettes sur l’estrade pour nous démontrer par a + b, non sans recul, drôlerie, malice et poésie, en quoi le fait d’avoir un enfant autiste serait un choix économique rationnel de la part des parents !

 

Il enchaîne ainsi des anecdotes truculentes et démonstrations désopilantes : l’autiste ne va jamais chez le coiffeur, ne s’intéresse ni à la mode ni à l’accumulation matérielle, ne fume pas, ne boit pas, ne cuisine pas etc.

 

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« Les enfants ‘dys’ sont des enfants intelligents qui souffrent de ne pas pouvoir le montrer ni le prouver»

 

Sophie Pohier, logopédiste, nous parle de son expérience en cabinet avec des enfants doublement exceptionnels de par leur haut potentiel intellectuel avec QI  >=  130 (chez 1 à 2% de la population) ainsi que de par leur dyslexie (chez 5 à 10% de la population).

 

Durant l’enfance, généralement ces 2 mécanismes de fonctionnement se compensent et/ou se masquent mutuellement.

 

A l’adolescence, le mode d’apprentissage change (nécessité de prendre des notes rapides, d’apprendre par cœur, de planifier et mettre des priorités dans son travail, d’acquérir une à plusieurs langues étrangères etc.) et révèle ainsi le dysfonctionnement cérébral du jeune, sous-tendu de troubles cognitifs sous-jacents associés à la dyslexie (trouble de l’identification des mots, trouble de la lecture etc.).

L’adolescent atteint alors les limites de ses capacités de compensation de sa dyslexie par son haut potentiel intellectuel. On parle de « craquage » qui se manifeste souvent par un échec scolaire et une mesestime personnelle.

 

Le diagnostic est donc retardé. Il s’agit alors d’identifier le profil de dyslexie : phonologique, lexicale ou dyspraxique. Et de rendre le jeune expert de sa dyslexie afin de le faire travailler sur la maîtrise et l’implication dans des objectifs précis. Ceci contribuera à valoriser l’erreur, la différence et donc l’estime de soi.

 

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« Tu as plus de chance de devenir un grand bandit qu’un grand chercheur ! »

 

Jacques Dubochet, chercheur et Prix Nobel de chimie, a publié récemment le livre « Parcours », partage son vécu de dyslexie, ainsi que son parcours de vie.

 

Depuis sa naissance en octobre 1941, « conçu par des parents optimistes » (c’est ainsi qu’il débute son CV !), il nous raconte comment son enfance de dyslexique paresseux et sans stimulation l’amène à être envoyé en pension au milieu du canton d’Appenzell. Il y rencontre un enseignant très à l’écoute et ouvert à la diversité qui va lui donner le goût de l’apprentissage et ainsi d’une certaine manière changer sa destinée.

 

Il défend justement l’idée que l’école doit enseigner la diversité et cultiver la différence, telle une institution où chacun peut s’exprimer au mieux de ce qu’il peut être.

 

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« Il est plus facile de créer des enfants solides que de réparer des adultes cassés »

 

Dr Olivier Revol, neuropsychiatre et pédopsychiatre, chef de service à l’hôpital Femme Mère Enfant au CHU de Lyon, conférencier et auteur de plusieurs livres, nous parle avec beaucoup d’humour et de bienveillance des ressemblances et différences des Troubles de l’Attention / Hyperactivité (TDAH) et du Haut Potentiel intellectuel (HPI), ainsi que de leur coexistence (TDAHP).

 

Chez le TDAH, l’agitation n’est qu’un des symptômes. On reconnaît aussi l’hyperactivité, le déficit d’attention, l’impulsivité, l’intolérance aux frustrations, la procrastination, la dysrégulation émotionnelle, la pensée en boule de flipper. Cela génère de l’incompréhension de l’entourage, un isolement social, l’échec scolaire et la perte d’estime de soi.

 

Chez le HP, les compétences ne sont pas homogènes. Mais on retrouve une insistance à vouloir se débrouiller seul, une rage de maîtriser et souvent une précocité du langage, qui peuvent faire que l’enfant se retrouve d’emblée décalé en famille et à l’école où il va s’ennuyer et manquer de méthode. De plus, sa pensée en arborescence induit un « disque dur plein » qui nécessite de dégager de l’espace psychique afin de récupérer de la mémoire vive pour l’apprentissage.

 

Le TDAHP quant à lui, c’est « double peine, double chance ». Quand l’individu apprend à passer de l’hyperactivité à la proactivité. Imaginez une vision amplifiée et exaltée du monde, un regard scrutateur qui capte l’émotion des autres telle une éponge à émotions (hypersensibilité et empathie), le tout couplé à l’audace et la créativité !

 

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Les 4 conférenciers de la soirée
Soirée CXIO 27.06.2019
Anne Gimalac et Caroline-Laure Gousseau

« La force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres »

« Il s’agit d’explorer la personne qui n’est pas prévue »

 

Les 4 « rock stars de la différence » sont finalement réunies pour une table ronde et une session de Questions-Réponses avec le public, le tout animé par le journaliste Christophe Ungar.

 

Leur dénominateur commun de nos 4 orateurs, c’est le désir et l’aptitude de « voyager », d’être en contact avec l’altérité, de cultiver les bons côtés de la différence comme un tremplin plutôt qu’un boulet, de faire de la différence une richesse. Le maître-mot est en effet d’ « explorer la personne qui n’est pas prévue ».

 

Une discussion s’ouvre alors sur la notion de spectre / continuum entre Normalité & Différence. Il est notamment suggéré que c’est la souffrance de l’individu qui fait que sa différence devient un trouble pour lui-même.

 

Il existe un paradoxe dans notre société actuelle : d’un côté elle est de plus en plus normative et « politically correct » marginalisant ainsi de plus en plus de personnes ; d’un autre côté elle reconnaît la différence et adopte des lois sur le handicap.

Il est aussi notable que trop d’inclusion peut être blessant au niveau narcissique.

Où placer la ligne ? S’agirait-il donc de trouver le juste milieu entre la pathologisation / l’étiquette, et l’inclusion ? L’étiquette peut être libératrice en amenant une compréhension et une solution. Alors, quid d’une inclusion à temps partiel ?!

 

Et quid d’un trouble de la normalité, et non d’un trouble de l’anormalité ? Faudrait-il changer la définition de la normalité ? La normalité est-elle le summum de ce qui peut s’atteindre ?…

 

Faisons de notre société un magnifique tapis oriental, résultat du tissage de fils très différents, faisant émerger de superbes motifs colorés.

 

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Anne Gimalac

Anne GIMALAC (MSc MBA)
Innovation & Business Development
Personalized & Preventive Healthcare
Co-founder of Tailored-Tea

Nos remerciements chaleureux à Anne Gimalac pour le compte-rendu de cette soirée

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